Jusqu'où va aller Trump dans sa croisade commerciale?
Les négociations commerciales sino-américaines sont de nouveau dans l'impasse. La Chine vient d'annoncer des mesures de rétorsion suite à la décision des États-Unis d'augmenter les taxes sur 200 milliards de dollars d'importations chinoises. Mais la croisade menée par Trump pourrait ne pas s'arrêter à la Chine. De nouveaux droits de douane sur les voitures et les pièces automobiles sont en effet à l'étude et pourraient toucher d'importants partenaires des Américains.
Selon le ministre US du commerce, Wilbur Ross, le déficit commercial américain est dû, d'une part, aux échanges commerciaux avec la Chine et, d'autre part, à l'industrie automobile. Que ce soit à cause de manœuvres dilatoires de la part des Chinois ou de techniques de négociation mises en œuvre par les Américains (la vérité se situe vraisemblablement quelque part entre les deux), l'espoir d'un accord commercial entre les deux grandes puissances a de nouveau pris un coup dans l'aile. Le président Trump aura donc tout le loisir de se pencher maintenant sur le second volet du déficit. En février, Trump avait reçu un rapport concernant l'éventuel impact des importations de voitures et de pièces automobiles sur la sécurité nationale. Il disposait d'un délai de 90 jours pour étudier ce rapport. Ce délai arrivera à échéance samedi. Le président devra donc décider s'il compte étendre sa guerre commerciale à des alliés comme l'Union européenne et la Corée du Sud via l'instauration de droits de douane sur les importations de l'industrie automobile. Ces pays espèrent aujourd'hui que Trump reportera l'échéance d'au moins six mois.
Un quart des importations automobiles aux États-Unis provient de l'UE. Et 29% des exportations automobiles européennes (soit 53 milliards de dollars) sont destinés aux États-Unis. Les constructeurs européens attendent donc la décision de Trump avec beaucoup de fébrilité. La commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, a d'ores et déjà fait savoir que l'UE était prête à prendre des mesures de rétorsion, en présentant une liste de produits américains (pour 20 milliards d'euros) qui pourraient faire l'objet de nouveaux droits de douane européens. La Corée du Sud se trouve dans la même situation que l'UE, mais elle dispose de moins de munitions pour se défendre. Après la Chine, les États-Unis sont en effet le principal partenaire commercial de cette économie exportatrice, dans laquelle l'industrie automobile occupe une place centrale. La Corée du Sud redoute dès lors d'énormes pertes d'emplois, mais se trouve dans une position délicate. Outre sa dépendance économique, la Corée du Sud dépend également de l'aide politique/militaire des États-Unis. Plus de 28 500 soldats américains sont en effet stationnés dans la partie méridionale de la péninsule coréenne pour la protéger contre Kim Jong Un, le dictateur nord-coréen qui dispose de l'arme nucléaire. Le pays enverra encore une délégation à Washington cette semaine pour tenter d'échapper (en partie) à de nouveaux droits de douane.
La semaine passée a été particulièrement chahutée sur les marchés financiers. L'escalade inattendue dans les discussions entre les États-Unis et la Chine a entraîné une chute des cours boursiers et des taux. Hier, le président Trump a tenté de faire baisser la tension, avec succès. Le conflit sino-américain est, du moins pour un moment, repassé au second plan. Les actions européennes ont repris un peu de couleurs, tout comme le taux à 10 ans allemand. Nous pensons toutefois que la prudence reste de mise. Trump dispose en effet d'autres munitions et pourrait encore étendre sa croisade commerciale.